Selon l’article L. 4121-1 du Code du travail, “L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs […]”. L’article signé par le cabinet 1792 Avocats soumet ainsi l’employeur, tant en ce qui concerne les maladies professionnelles que les accidents du travail de ses salariés, à une obligation fondée sur les résultats.
Article paru dans le n° 94 de Béton[s] le Magazine
Une obligation de moyens impose à la victime d’apporter la preuve de la faute commise par la personne sur qui pèse l’obligation. Au contraire, une obligation de résultats n’implique pas que soit démontrée une quelconque imprudence ou négligence. Le simple fait de ne pas satisfaire au résultat pesant sur l’employeur – à savoir, assurer la sécurité de ses salariés – suffit donc à engager sa responsabilité.
L’obligation de moyens est générale et concerne notamment les accidents survenus lors de la décharge de matériaux, les tendinites, les maladies dues à l’exposition à des substances chimiques. Mais aussi, le harcèlement moral perpétré par un autre salarié du même employeur[1]. L’employeur peut aujourd’hui néanmoins tenter de s’exonérer de cette responsabilité, en démontrant “avoir mis en œuvre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité, et protéger la santé physique et mentale des salariés prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du Code du travail[2]”.Malgré son nom, il s’agit aujourd’hui d’une obligation de moyens renforcée plutôt que d’une obligation de résultats. Attention, l’employeur doit démontrer avoir mis en œuvre “toutes les mesures”, et non pas simplement “des mesures” pour protéger ses salariés.
Plusieurs options
En cas de récidive ou de violation manifestement délibérée ayant exposé les salariés à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente, l’employeur qui méconnaît son obligation peut être condamné à un an de prison, outre l’indemnisation du préjudice subi par son salarié.
En cas de mise à disposition de salariés, cette obligation de sécurité pèse tant sur l’entreprise utilisatrice que sur l’entreprise de travail temporaire.
Enfin, rappelons que les chantiers de bâtiment, de génie civil, ou de travaux de gros entretien et de rénovation, “où sont appelés à intervenir plusieurs travailleurs indépendants ou entreprises, entreprises sous-traitantes incluses”, sont en plus soumises à la présence d’un coordinateur sécurité et protection de la santé (CSPS). Ce dernier a pour mission de prévenir les risques croisés pour les salariés des différents intervenants[3].
Le devoir de prudence du salarié
Quant au salarié, il est soumis à un devoir légal de prudence[4], dont la violation peut constituer une faute grave, justifiant son licenciement. Et, par ailleurs, sa responsabilité civile peut être engagée en cas de faute intentionnelle. En contrepartie, le salarié dispose d’un droit d’alerte et de retrait[5]. Lorsqu’une situation de travail présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé, ou lorsqu’il constate une défectuosité des systèmes de protection, il en alerte immédiatement son employeur. Et peut se retirer, sous réserve de ne pas créer ainsi une nouvelle situation dangereuse.
L’employeur ne pourra pas contraindre ce salarié concerné à reprendre son poste et ne pourra pas le licencier pour ce motif (sous peine de nullité du licenciement prononcé). En revanche, si le salarié use de cette faculté en l’absence de danger réel ou a minima perçu, il s’expose à une retenue sur son salaire, cela même s’il reste à la disposition de son employeur.
L’obligation du salarié de veiller à sa propre sécurité n’affecte cependant pas le principe de la responsabilité de l’employeur.
Pierre Lacoin
Avocat à la Cour
Cabinet 1792 Avocats
1Cass. soc., 21 juin 2006, n° 05-43.914.
2Depuis un arrêt “Air France” (Cass. soc., 25 novembre 2015 n° 14-24.444).
3Article L. 4532-2 du Code du travail.
4Cass. soc., 28 mai 2008, n° 06-40.629.
5Article L. 4131-3 du Code du travail.