La rénovation énergétique, au cœur des débats actuels et des leviers vers la lutte contre le réchauffement climatique, est un enjeu de taille. Mais dans le cadre du bâti ancien, comment allier performance et patrimoine architectural ?
Si vous visitez la Cité médiévale de Provins, vous serez marqué par l’ambiance très particulière qui y règne. Détentrice d’un bout de l’histoire des XIe, XIIe et XIIIe siècles, la ville est un parfait témoin, en termes de patrimoine culturel et architectural. Cette parenthèse historique permet à chacun de se rappeler qu’à une époque, les chevaux remplaçaient les voitures. Qu’avant les plates-formes de streaming de musique, des ménestrels et autres troubadours égayaient (ou non) les oreilles des habitants. Et que “drapier” était un métier et non un champagne… A Provins, l’immersion dans le passé se fait aussi grâce aux 58 Monuments historiques classés ou inscrits. Les différents bâtiments se divisent en plusieurs catégories : l’usage civil, militaire et religieux. Ainsi, d’impressionnants remparts fortifiés serpentent dans la ville.
Avant 1948
Le sommet de la tour César, donjon symbolisant la puissance des comtes champenois, offre une vue panoramique sur toute la ville. Et l’église et le prieuré de Saint-Ayoul épousent différents styles au grès de sa construction. La bulle historique n’aurait jamais pu perdurer si un travail de réhabilitation et de rénovation n’avait pas eu lieu. Ces édifices auraient très bien pu être détruits au profit de constructions neuves répondant aux enjeux sociétaux modernes. Mais le nouveau Monde doit-il toujours prévaloir sur l’ancien ?
Lorsqu’une réalisation d’un autre temps est effacée du paysage, c’est aussi les savoir-faire et les matériaux locaux qui s’en vont avec. En France, les bâtiments anciens (d’avant 1948) représentent un tiers du parc immobilier. Et leur pérennité pose de nombreuses questions. Déjà, comment accorder une politique de neutralité carbone d’ici 2050 et la préservation du patrimoine ? En effet, la rénovation énergétique, au cœur des débats actuels et des leviers vers la lutte contre le réchauffement climatique, est un enjeu de taille.
Une réflexion globale autour de la rénovation
Certains bâtiments anciens bénéficient, tels quels, d’un bon fonctionnement, mais disposent d’une consommation énergétique élevée. Dans ce cas, une rénovation pourrait altérer l’éco-système du bâti. Cette problématique entraîne alors une nouvelle question. Comment intervenir sur ces constructions sans atteindre son inertie naturelle, sa perspirance et autres qualités ? Et surtout, sans défigurer l’émotion architecturale et patrimoniale ?
Le décret tertiaire
Annoncé, re-retoqué par le Conseil d'Etat, pour être finalement adopté, le décret tertiaire a fait parler de lui pendant plusieurs années. Ce dernier précise les modalités d’application de l’article 175 de la loi Elan sur la rénovation énergétique des bâtiments du tertiaire de plus de 1 000 m2. Ainsi, les propriétaires devront diminuer leur consommation énergétique finale de 40 % en 2030, 50 % en 2040 et 60 % en 2050 par rapport à 2010 . Ou bien atteindre un certain seuil exprimé en valeur absolue. Ils sont aussi tenus de réaliser un suivi “énergétique” via la plate-forme Operat (pilotée par l'Ademe), dès 2021. Pour les bâtis anciens, des adaptations peuvent être envisagées, si le caractère patrimonial ou architectural est justifié. Car désormais, le non respect du décret tertiaire entraînera des sanctions. Certains bâtiments sont exemptés, à l'image des constructions ayant donné lieu à un permis de construire à titre précaire, ceux dédiés en totalité ou en partie au culte. Et ceux dédiés à la défense, la sécurité civile ou la sûreté intérieure du territoire. Un nouvel arrêté précisant les seuils énergétiques à atteindre sera prochainement publié.
Systématiser une pratique de rénovation énergétique semble impensable. Le modus operandi se réfléchit alors au cas par cas, en fonction des matériaux et de la typologie de la réalisation. Pour les acteurs de la rénovation, industriels ou entreprises, le défi est relevable, en travaillant en synergie et équilibre entre : performance énergétique, respect du patrimoine et démarche environnementale.
Sivagami Casimir
Aller plus loin :
– Interview : Creba : La réhabilitation durable du bâti ancien
Créé en 2018, le Centre de ressources pour la réhabilitation responsable du bâti ancien (Creba) met en lumière la réhabilitation raisonnée du patrimoine français.
– Interview : Green Soluce : Accompagnement global pour projets durables
Créé en 2010, le cabinet de conseil Green Soluce est spécialisé dans le conseil et l’accompagnement vers la transition environnementale à l’échelle du bâtiment, mais aussi du territoire.
– Actualité : Effinergie Patrimoine : Rénovation en dentelle
Est-ce qu’un bâtiment à valeur patrimoniale peut prétendre à une bonne performance énergétique ? Pour Effinergie, la réponse est “oui”.
– Réalisation : L’accord parfait pierre, chaux et chanvre
A Penvénan, en Bretagne, les propriétaires d’une maison en pierre ont voulu une rénovation respectueuse de l’environnement. Un chantier qui a fait appel à des matériaux biosourcés.
– Réalisation : Lycée Henri IV : A la croisée des savoirs
La rénovation énergétique des bâtiments anciens nécessite un travail particulier au niveau du choix des travaux à effectuer. Mais une fois le protocole validé, comment se déroule la mise en place du chantier ?
– Savoirs : Les caractéristiques de la rénovation durable
Outre le mode opératoire, la question des pratiques plus durables est de plus en plus abordée dans le monde de la rénovation. Quelles en sont les caractéristiques ? Réponses
– Savoirs : Dufrêne Rénovation : Adapter la prévention à des chantiers de particuliers
En Charente, l’entreprise Dufrêne Rénovation intervient en majorité sur des chantiers de rénovation, en gros œuvre et en couverture. Des spécialités qui impliquent des approches spécifiques, en termes de prévention.