Dans une excellente interview donnée à la revue “Tracés/Espazium”, notre consœur Laura Ceriolo donne la parole à l’ingénieur Michel Virlogeux. Contacté après le désastre du viaduc de Gênes, c’est l’occasion pour lui de revenir sur l’entretien des ponts.
Dans une excellente interview donnée à la revue “Tracés/Espazium”, notre consœur Laura Ceriolo donne la parole à l’ingénieur Michel Virlogeux, contacté après le désastre du viaduc de Gênes.
Avant toute chose, Michel Virlogeux constate, avec regret, que les ingénieurs ont perdu de leur influence sur les projets de très grands ponts, dont le design est bien souvent attribué aux architectes. « Or, la responsabilité et la réussite de l’ouvrage reposent en premier lieu sur l’ingénieur. »
Michel Virlogeux revient sur la conception des ponts à haubans de Riccardo Morandi, qui était, selon lui, « une voie sans issue». Puis, Michel Virlogeux aborde la durabilité des ouvrages en béton : « il faut d’abord un béton très compact, ce qui n’était pas le cas à cette époque, où l’on croyait que le béton était éternel ».
« Je ne connaissais pas l’état du béton du viaduc du Polcevera mais, à Gênes, l’atmosphère est corrosive : la mer est proche, il fait chaud et l’ouvrage traverse un site industriel. […] Le phénomène a été catastrophique, parce que la conception du viaduc n’avait aucune redondance : la rupture d’un seul hauban ne pouvait conduire qu’à un effondrement. »
Le pont de Normandie et le viaduc de Millau
L’ingénieur parle ensuite de l’entretien des ponts. Concernant le pont de Normandie ou le viaduc de Millau conçus par Michel Virlogeux, une équipe sur place gère les ouvrages. Des inspections sont régulièrement effectuées. « En tant que concepteur, je suis associé à toutes ces opérations. » Il y a surtout dans ces ouvrages une redondance qu’il n’y a pas à Gênes. « A Millau, les calculs ont montré qu’il est possible de perdre trois haubans de suite sans que le pont ne s’effondre. »
Selon l’avis de Michel Virlogeux, ce serait la corrosion des haubans, qui est à l’origine de l’effondrement du viaduc de Gênes. « Toutefois, la conception de l’ouvrage, en parties indépendantes, a limité l’effondrement à un pylône et aux deux travées “suspendues” adjacentes. Sans cette division, les conséquences auraient pu être encore plus dramatiques », conclut Michel Virlogeux.