L’Espagnol Pejac est récemment intervenu trois fois sur les murs en béton de l'hôpital universitaire Marqués de Valdecilla, dans sa ville natale de Santander, au Nord de pays. Du grand art urbain.
Lorsqu’on parle de l’artiste urbain Pejac (né en 1977), les termes qui viennent sont “message”, “adaptation” et “trompe-l’œil”. Peu importe qu’il travaille sur papier, sur toile, en public ou dans la rue, l’Espagnol a une énorme capacité à adapter son travail. Ceci, afin de faire passer un message clair et puissant. On peut qualifier Pejac de “poète urbain” et de rêveur. « La mélancolie et l’humour sont la locomotive de mes œuvres. Ils créent un langage poétique, dont l’essence ne repose pas sur la beauté simple, mais sur la face cachée de tout », explique Pejac.
Bien que la rue soit son domaine de prédilection, Pejac peint aussi sur toile. Son art est provocateur et critique, capable d’arrêter l’observateur dans son élan. Mais tout en subtilité.
A l’extérieur, il utilise pochoirs, peinture et bombes pour orner les villes au gré de son imagination.
A l’intérieur, il modifie la réalité à l’aide de ses toiles ou des collages sur ses fenêtres. Pejac sait détourner des objets de leur quotidien et leur donner un sens différent. Il ouvre les portes de l’univers de la poésie, mais aussi celui de la réflexion.
Pejac et la crise sanitaire
Ses dernières œuvres ? Pejac en a récemment créé trois à l’hôpital universitaire Marqués de Valdecilla, dans sa ville natale de Santander, au Nord de l’Espagne. A savoir “Distance sociale”, “Surmonter” et “Soin”. Regroupées dans le projet intitulé “Force”, ces réalisations graphiques montrent le besoin d’être fort. Qualité nécessaire dans le monde où nous vivons aujourd’hui, avec la pandémie et la crise sanitaire.
Avec “Force”, l’artiste aborde 3 aspects différents de la situation actuelle. Et propose les moyens avec lesquels nous pourrions y répondre. « L’idée de mon projet est un geste de gratitude envers les personnels de santé de Valdecilla. Ceci, pour leur travail, en général et pendant la crise de Covid, en particulier. Je leur offre ce que je fais le mieux, c’est-à-dire la peinture », insiste Pejac.
Et de poursuivre : « Dès le premier instant, l’hôpital a été réceptif et enthousiaste. Ce qui a permis au projet de se dérouler de manière harmonieuse et facile. De plus, on m’a donné une totale liberté de création. Ce fut un luxe d’avoir la confiance et le soutien de l’établissement tout entier ».
Trois aspects de la pandémie
“Distance sociale” est une intervention en trompe-l’œil, qui crée l’illusion d’une profonde crevasse sur la surface rigide d’un mur en béton. Réalisé à partir d’innombrables silhouettes humaines qui tentent d’y échapper. L’artiste urbain a voulu représenter la blessure que cette pandémie a laissée. Si l’image sert de métaphore, elle propose aussi littéralement la distance sociale comme moyen de les réparer. Au milieu de la foule, Pejac a inclus des scènes de retrouvailles, d’empathie, de soins et d’amour. Suggérant une porte vers un avenir meilleur et plein d’espoir.
“Surmonter” est la deuxième pièce de la série, qui a été réalisée avec l’aide de jeunes patients en oncologie. Représentant la silhouette d’un enfant recréant avec ses mains “Le champ de blé avec des cyprès” de Vincent Van Gog. L’œuvre est en quelque sorte un miroir du travail de Pejac, réalisé en Norvège de 2015. Montrant un garçon peignant “Le cri” d’Edvard Munch avec ses voitures-jouets. Dans “Surmonter”, l’enfant est debout sur un fauteuil roulant. Il œuvre plus haut que les autres. « C’est quelque chose que nous – en tant que société – pourrions faire : prendre cette crise et l’utiliser pour nous propulser en avant »,suggère l’artiste.
Enfin, “Soin” est la dernière réalisation peinte qui décrit poétiquement la nouvelle dynamique de la relation imposée par le virus Covid entre les patients et les personnels de santé. Tout en se tenant physiquement à distance et en ne se regardant que l’un l’autre, leurs silhouettes dépeignent le besoin et le souhait de revenir au contact physique. Pejac a aussi ajouté un sentiment de sérénité et de beauté, en transformant les ombres des personnages en des étangs colorés et paisibles avec des nénuphars. Rendant ainsi hommage à l’un de ses peintres préférés, Claude Monet.
Un peu de douceur dans ce monde qui va mal…
Muriel Carbonnet
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