Dans les Ardennes, Bemaco assure la préfabrication de pièces standards et sur mesure, en béton armé et précontraint. L’entreprise possède son bureau d’études, son atelier d’armatures et ses équipes de pose. Cette multiplicité de métiers l’a poussée à mettre en place une stratégie globale en matière de management de la santé et de la sécurité au travail.
Article paru dans le n° 96 de Béton[s] le Magazine.
Les risques liés aux activités de préfabrication sont classiques : le port de charges lourdes, les risques d’écrasement, la manutention manuelle, les TMS… La diminution continue de ces risques passe par l’automatisation d’un maximum d’opérations, mais toutes ne peuvent pas l’être, comme les pièces fabriquées sur mesure, les accessoires… qui nécessitent toujours des interventions manuelles.
Les risques potentiels peuvent aussi être importants au niveau des livraisons, lorsque les conditions d’accès et de déchargement ne sont pas optimales. Néanmoins, les opérations de déchargement sur chantier sont réalisées par les grutiers. Ce qui diminue les risques au niveau des chauffeurs, dont l’intervention se limite à retirer les sangles et à d’éventuelles situations de co-activité.
Les interventions sur chantier impliquent un travail permanent en hauteur à partir de nacelles. Ces chantiers nécessitent un personnel aguerri au montage d’éléments préfabriqués et qui savent évoluer en permanence avec les grutiers, dont le rôle est ici prépondérant.
En 2021, le système de management “Santé et Sécurité au travail” de Bemaco a été référencé selon le référentiel ISO 45001. « Cette certification confirme l’engagement de la direction et de l’ensemble du personnel dans la prévention des risques et de l’amélioration des conditions de travail », précise Marie De Salvador, responsable QSE. En quatre ans, Bemaco aura investi près de 100 000 € en formations (management, Caces, pont roulant, sauveteur-secouriste du travail ou SST…) par le biais du centre de formation du CFA Urano, à Warcq.
La prévention
Bemaco a mis en place un processus d’accueil très strict. Tout nouvel embauché est d’abord orienté vers un test en sécurité informatisé, suivi d’une évaluation. Si celui-ci est concluant, le service Qualité Sécurité Environnement (QSE) poursuit avec un accueil sécurité complet. Le tout dure environ une demi-journée. S’en suit une description du futur poste de travail par un chef d’équipe. Les nouveaux entrants sur chantier suivent aussi une évaluation de leur formation Caces “nacelle”.
Le personnel arrivant reçoit son package d’EPI, adapté aux spécificités de chaque poste de travail. « Nous allons souvent plus loin que ce que nous impose la réglementation,indique Marie De Salvador. Par exemple, nous avons développé et adopté l’usage de gilets de protection, pour les collaborateurs qui sont affectés aux postes les plus contraignants. Nous avons doté notre personnel de talkies-walkies, afin de faciliter la communication dans nos ateliers et sur nos chantiers. »
Toutes ces actions ont porté leurs fruits, puisqu’en 4 ans, les taux de fréquence d’accident ont été divisés par 3. La très grande majorité des arrêts de travail concernaient des blessures légères, mais leur taux élevé nécessitait d’analyser les causes et d’en déduire les actions à mener. La mise en place d’un véritable service QSE, composé de 3 personnes, a permis d’aller plus loin, en termes de méthodologies, d’ergonomie, de réduction des TMS et de diminution globale des risques.
De plus, ces études ont abouti à limiter l’usage des outillages à main, causes de petites blessures, dès lors que cela est possible, voire à faire évoluer les process pour éviter leur usage. On peut aussi citer “la chasse” aux échelles, abusivement utilisées pour des interventions courtes, pour les remplacer par des gazelles.
L’entreprise aura ainsi investi dans l’amélioration des postes de travail, le renforcement des contrôles du port des EPI, des formations pour les encadrants, des moyens digitaux, par exemple l’utilisation des tablettes pour le suivi des chantiers au niveau QSE…
La préfabrication
Les dirigeants de Bemaco s’emploient à réduire, voire à supprimer la plupart des risques liés aux activités de préfabrication, comme le port de charges lourdes, les risques d’écrasement, les manutentions manuelles… Sans surprise, la diminution continue de ces risques passe par l’automatisation et l’évolution des différents process. L’entreprise travaille en permanence à l’amélioration des postes de travail, par des collaborations permanentes avec la Carsat, l’OPPBTP, la médecine du travail…
A titre d’exemple, une expérimentation a récemment été engagée avec Comau et Hilti, qui ont réalisé un exosquelette destiné à améliorer les conditions de travail des opérateurs affectés à la fabrication. Dans un premier temps, les résultats n’ont pas été à la hauteur des espérances, les opérateurs estimant le matériel trop encombrant. Ils sont maintenant en attente d’un prototype réalisé par Hilti, destiné aux interventions sur les coffrages, les éléments fabriqués à plat… Tout ce qui impose de se pencher de façon répétitive et de multiplier les manutentions manuelles.
La gestion du bruit est aussi une problématique récurrente. Bemaco réalise à intervalles réguliers des commandes de bouchons moulés, afin que la protection auditive du personnel soit en permanence optimisée. Et les opérateurs qui supportent mal ce type de protections continuent à porter des casques anti-bruits.
Même automatisées, les différentes manutentions peuvent générer des risques : écrasement par chute de charges, mauvais élingage, manipulations inadaptées des ponts roulants… Les Caces “pontier”, officialisés depuis 2020, ont permis d’optimiser la formation d’une quarantaine d’opérateurs.
Enfin, la mise en place d’une démarche participative dans les ateliers, avec l’intégration de la méthode des 5S et la création de plusieurs groupes de travail dédiés à la sécurité, a facilité l’amélioration les conditions de travail. En plaçant le personnel au cœur de ces démarches, cela a permis de mettre en place une culture forte en matière de sécurité.
Le transport et les chantiers
Une flotte de 150 camions assure les livraisons sur tous les chantiers. Hormis les risques routiers traditionnels qui imposent des sensibilisations régulières et interactives (téléphone, alcool, addictions diverses, respect des limitations de vitesse), les dangers se situent au niveau des chargements et déchargements. Et concernent souvent les mains et les pieds. Toutefois, dans les faits, ils sont très réduits pour les chauffeurs, car ce sont des pontiers qui effectuent les opérations les plus délicates. En ce qui concerne le site de production, les quais de chargement sont équipés de passerelles à niveau. Ce qui aide à réduire les manutentions manuelles, ainsi que les problématiques qui y sont liées.
Il faut ajouter les contraintes de chantiers. Les chemins de circulation sont parfois mal revêtus et l’état de la plate-forme peut être dégradé en raison des conditions climatiques. Ce qui pose problème vis-à-vis de l’utilisation des nacelles. Les compagnons y sont par conséquent très sensibilisés. Bemaco pratique en permanence, sur ces sujets comme sur d’autres, la remontée d’informations. Ceci permet de faire profiter des expériences, bonnes ou mauvaises, aux autres équipes. Et de proposer les éventuelles améliorations nécessaires.
La mise en œuvre sur chantier est assurée par les équipes de pose. Ces interventions, assez répétitives, impliquent un travail permanent en hauteur à partir de nacelles, du levage de charges, ainsi que la manipulation de pièces plus ou moins lourdes. « Nous ne recrutons que des grutiers expérimentés», insiste Marie De Salvador. En effet, les éléments à décharger, à manutentionner et à positionner pèsent de 5 à 30 t en moyenne. Ce qui implique une expérience importante de ce type de travaux.
Gérard Guérit