De 2012 à 2018, quelque 47 partenaires se sont mobilisés dans le cadre du projet national Recybéton. A partir des compétences de chacun des membres, le consortium a émis plusieurs recommandations dans le cadre de la fabrication et de l’utilisation de bétons dotés de granulats recyclés.
Dans le cadre du projet national Recybéton, quelque 47 partenaires (maîtres d’ouvrage, entreprises de construction, producteurs de matériaux, ingénieries, assureurs ou encore organismes de recherche) se sont mobilisés durant 6 ans, afin de mettre en œuvre un projet de recherche collaborative. Ainsi de 2012 à 2018, Recybéton a produit différents outils. Ils rendent compte des acquis scientifiques dans le domaine du recyclage du béton. Le projet national a aussi émis plusieurs recommandations. En vue de promouvoir et d’accompagner l’utilisation des granulats recyclés dans la production de nouveaux bétons. « Ces dernières identifient les possibilités ouvertes à l’usage des granulats recyclés dans les bétons et dressent une liste des bonnes pratiques aux différentes étapes de leur utilisation », précise Recybéton.
I – Quelles sont les exigences, en termes de production des granulats recyclés et de la durabilité des bétons ?
Pour la caractérisation et le contrôle des granulats recyclés, Recybéton préconise de respecter les exigences des normes NF EN 12 620 et NF P 18-545 en y apportant quelques ajustements. Lorsque le béton est soumis à un environnement XF3 ou XF4, chaque lot de gravillons recyclés utilisé doit faire l’objet d’un essai de gélivité. Dans le cadre de la prévention de l’alcali-réaction, le consortium conseille d’éviter l’utilisation des essais crible (essai microbar et à l’autoclave). Il faut ainsi privilégier le bilan des alcalins et/ou l’essai à long terme. Du côté de la durabilité des bétons, Recybéton conseille de prendre en compte un nouveau taux de sulfates plafond pour le granulat recyclé, en limitant plus sévèrement le taux de sulfates pour l’ensemble des granulats de la formule.
Il faut aussi utiliser le bilan des alcalins ou l’essai à long terme pour évaluer le risque de développement de l’alcali-réaction d’une formule de béton recyclé. De plus, il convient de prendre des valeurs limites de taux d’incorporation des granulats recyclés supérieures aux valeurs indiquées dans la norme NF EN 206/CN : 2014, pour les gravillons recyclés de type 1 ou 2. Et pour les sables recyclés présentant une absorption d’eau limitée. Pour chaque type de granulats recyclés considéré, ces valeurs dépendent de la classe d’exposition du béton et du rapport Eeff/Leq. Ces valeurs limites sont valables, quelle que soit la résistance à la compression du béton.
II – Quel dimensionnement pour les ouvrages en béton, contenant des granulats recyclés ?
L’usage des granulats recyclés peut s’envisager non seulement pour le béton armé, mais aussi pour le béton précontraint. Sous certaines conditions plus restrictives. Au terme de ses recherches, le projet Recybéton recommande d’utiliser les règles actuelles de calcul de l’Eurocode 2, lorsque le taux d’incorporation des granulats recyclés est faible (pas applicable dans le cas de bétons précontraints). Pour des taux intermédiaires, il faudrait modifier de manière forfaitaire certains modèles de calculs de l’Eurocode 2. A savoir :
- la densité,
- la résistance en traction,
- le module d’élasticité,
- le fluage et le retrait,
- la relation (σ-ε) en compression pour l’analyse non linéaire,
- l’analyse des effets du second ordre et certains paramètres d’état limite de service (ELS) et d’état limite ultime (ELU).
Si les dosages de granulats recyclés sont élevés, il faut mettre en place des procédures, afin de limiter la variabilité des propriétés du béton recyclé et de contrôler de manière expérimentale les propriétés mécaniques critiques du matériau, en plus des modifications pré-citées.
III – Comment formuler un béton contenant des granulats recyclés ?
Dans sa liste de recommandations, Recybéton s’est questionné sur la formulation des bétons dotés de granulats recyclés. Le groupe de recherche en est venu à la conclusion qu’il convient d’appliquer la démarche générale de formulation, sous réserve de considérer certaines spécificités. Comme prendre une marge de sécurité plus importante sur la résistance à la compression moyenne visée. Vérifier les propriétés secondaires (par exemple, le module élastique, la résistance en traction, le retrait ou le fluage) lorsqu’elles sont critiques pour le projet de construction. Mais aussi évaluer le rapport Eeff/Leq, en pensant à la portion volumique des granulats recyclés, tout comme l’ajustement de l’eau efficace. De plus, la formulation doit prendre en compte l’absorption importante d’eau des granulats recyclés dans le calcul de l’eau totale dans le mélange.
IV – Quid de la production et du contrôle ?
L’usage de granulats recyclés nécessite quelques adaptations dans le procédé de fabrication. En termes de stockage de coupures supplémentaires ou l’utilisation de pré-mélanges. Mais aussi sur l’impact des moindres performances du granulat recyclé :
- absorption plus forte,
- humidité potentiellement plus forte,
- résistance à l’attrition et à la fragmentation plus faible.
Lorsque la présence de granulats recyclés dans le béton est prise en compte dans la conception de l’ouvrage, la densité du béton devra être contrôlée en même temps que la résistance en compression. De plus, pour les forts taux de recyclage, les propriétés mécaniques critiques pour le projet devront être surveillées par un programme de contrôle approprié. Par ailleurs, le bon de livraison du béton prêt à l’emploi doit être adapté selon les taux de substitution adoptés.
V – Comment assurer le béton formulé sur la base de granulats recyclés ?
Pour le producteur de granulats recyclés ou de bétons en contenant, le respect de l’ensemble des recommandations de Recybéton facilite l’assurabilité complète quoique facultative des matériaux recyclés. Du fait de produits défectueux, vices cachés ou responsabilité avec ou sans faute. Pour l’entreprise de travaux, l’utilisation de ces bétons entre dans le périmètre de l’assurance décennale obligatoire liée à certains ouvrages. A noter que l’utilisation de ces derniers, au-delà des pratiques reconnues comme des techniques courantes, nécessite impérativement l’information préalable à l’assureur.
VI – Booster son bilan environnemental ?
Le caractère éco-respectueux des bétons de granulats recyclés issus de la déconstruction est peu valorisé par les méthodes actuelles de calcul de l’Analyse de cycle de vie (ACV). Et surtout au regard de l’indicateur lié au prélèvement de ressources renouvelables. Recybéton recommande de pratiquer l’ACV, selon la norme EN 15804/CN. En utilisant les données de la filière lorsqu’elles sont disponibles et validées, en attendant la publication des règles et exigences décrites dans les PCR (Product Category Rules) à paraître. Il préconise enfin de compléter l’ACV par l’évaluation de nouveaux indicateurs d’impacts. Par exemple, économie en granulats naturels, accroissement de la part recyclée des déchets générés par la déconstruction ou flux transportés en t/km. Et d’adapter le circuit d’acheminement des matériaux et la formulation des bétons recyclés de manière à minimiser les indicateurs d’impact.
Source : Synthèse des recommandations du projet national Recybéton.