Avec le système Caméléo, Rector veut révolutionner la conception des bâtiments de logements. Réduite au binôme “poteaux-planchers”, la structure porteuse n’est plus une contrainte.
Article paru dans Béton[s] le Magazine n° 91
Edifier, utiliser et démolir : le triangle des Bermudes de la construction… N’est-il pas possible de faire autrement ? De créer aujourd’hui le bâtiment qui s’adaptera aux usages de demain ? Avec son nouveau système constructif préfabriqué Caméléo, l’industriel Rector vient de s’engager dans cette voie d’avenir. « Caméléo est une structure plancher-dalle, sans aucune retombée de poutres, qui vient en appui direct sur des poteaux », résume Bertrand Schoot, chef de projet Caméléo de Rector. Cette approche impacte la manière de construire. Avec la seule présence des poteaux, les volumes intérieurs sont ouverts. Les contraintes liées aux murs et refends porteurs disparaissent. Les plafonds sont lisses par l’absence de poutres. Redéfinir un agencement intérieur se transforme en un jeu d’enfant. D’autant plus simple que l’emplacement des poteaux a été choisi avec pertinence.« Avec Caméléo, les bâtiments vont devenir des structures plus pérennes. Car affranchies des éléments encombrants qui perturbent leur évolution et leur modularité dans le temps », confirme l’architecte parisien François Pélegrin.
Des planchers-dalles en logements collectifs
Le plancher-dalle n’est pas une nouveauté en soi. En revanche, ce qui l’est est son emploi potentiel en logements. Le système n’est plus limité, par habitude ou dogme, aux seuls immeubles de bureaux. L’innovation est aussi liée à la filière qui propose le système : la préfabrication. « Pour Rector, la cible centrale de Caméléo est le bâtiment de logements en R + 3 », explique Bertrand Schoot.
En construction, l’industrialisation est en mesure d’apporter d’importants gains de productivité. L’entreprise est plus efficace, économise du temps et travaille en sécurité, tout en préservant ses marges. Le chantier devient plus court car la réalisation des éléments constructifs est faire en amont, en usine. Rector estime à 25 %, le gain de temps au niveau du gros œuvre.
Mais pour réussir son projet, l’entreprise ou le maître d’œuvre devra anticiper. En effet, il faut prévoir Caméléo dès la phase de conception, donc ne plus réduire le préfabricant à un simple fournisseur. Concevoir un bâtiment selon une approche “plancher-poteaux” est différent que de le faire en avec des voiles porteurs. Et il n’est pas possible de changer de technique constructive en cours de route.
D’importants gains au niveau des surfaces
« Il faut encourager les architectes à sortir du train-train de la construction classique, insiste François Pélegrin. Ce système ne dicte pas une architecture. »A contrario, on pourrait presque dire qu’il la libère. Quatre appartements familiaux peuvent évoluer, dans le cadre d’une transformation, en logements et studios pour primo-accédants. Ceci, sans frein majeur, puisque les seuls éléments fixes sont les poteaux porteurs et les trémies escaliers/ascenseur.
Le maître d’ouvrage se verra aussi récompensé par un gain non négligeable au niveau des surfaces au sol livrées. « Dans le cadre d’une construction comprenant 38 logements classiques, il est possible de libérer près de 13 m2, soit un bénéfice proche de 52 000 € en Ile-de-France », affirme Bertrand Schoot. Car c’est autant de surface non occupée par des murs et refends porteurs.
La réduction de l’empreinte carbone
D’un point de vue technique, Caméléo est un système complet dont l’élément centrale est la prédalle SPD (Système Plancher-Dalle). Celle-ci intègre toutes les armatures nécessaires à sa tenue sans besoin de poutres porteuses. en particulier les aciers anti-poinçonnement. Les poteaux préfabriqués et les prémurs destinées aux cages d’escaliers et d’ascenseurs complètent le dispositif. « Nous assurons une livraison cadencée sur le chantier, en fonction de l’avancement des travaux et du calendrier mis en place. »
Un autre argument mis en avant par Rector est la réduction de l’empreinte carbone. D’une part, du fait d’une économie de matière. « Le système exploite au mieux les performances mécaniques du béton armé pour alléger la structure, explique Bertrand Schoot. D’autre part, par l’augmentation potentiel de la durée de vie du bâtiment, qui n’a plus à être détruit à la fin de la première vie, pouvant juste être transformée.
Savoir mixer les matériaux
Il y a aussi la compatibilité avec le béton bas carbone. C’est une des pistes autour de laquelle travaille l’équipe de R&D de Rector. Ainsi, le béton à faible CO2devrait être remplacé, à moyen terme, le béton classique dans le process de production.
Enfin, Rector indique de Caméléo s’inscrit en totalité dans une démarche d’éco-conception. Et selon le choix des matériaux complémentaires indispensables à la construction, les gains peuvent être importants ou positifs. On parle ici des éléments de remplissage, qu’il s’agisse de construire les façades (non porteuses) ou les cloisons intérieures. En optant pour un remplissage maçonné, le gain CO2et m2reste limité. Mais passe au vert sur tous les critères, si c’est le bois qui est préféré. La nuance vient de la mise en œuvre de matériaux bio-sourcés, qui affichent un empreinte CO2positive. Mais limite le gain en m2.« A chaque concepteur de faire les choix les plus en phases par rapport à son projet », conclut Bertrand Schoot.