Résistance thermique des parois du bâtiment

Rédaction
29/01/2019
Modifié le 29/07/2020 à 12:08

Augmenter l’épaisseur des isolants n’augmente pas de manière proportionnelle la performance thermique du bâtiment. Les gains thermiques et financiers engendrés par l’épaisseur des couches isolantes sont donc variables…

Tour Polaris, à Nantes (44), isolée en ITE par Foamglas, avec impact sur le C+D. [©Lan Architecture]
Tour Polaris, à Nantes (44), isolée en ITE par Foamglas, avec impact sur le C+D. [©Lan Architecture]

L’objectif de cet article est de présenter le mode de calcul de la résistance thermique d’une paroi simple et de sa conductance thermique théorique. Les calculs illustrent que la conductance thermique d’une paroi (sols, murs, toitures) n’est pas proportionnelle à l’épaisseur de la couche isolante, comme on le pense trop souvent. Puis, est exposée une approche par le calcul des déperditions énergétiques d’une toiture et d’un mur isolés, en faisant varier l’épaisseur de l’isolation, afin de mieux comprendre l’impact financier de la couche isolante, en termes d’économie d’énergie et d’économie financière.

Calcul de la résistance thermique d’une paroi 

La résistance thermique d’une paroi simple, composée de couches de matériaux chacune d’épaisseur constante, se calcule facilement à l’aide de deux types de données : l’épaisseur et la conductivité thermique de chaque couche de matériau. La conductivité thermique d’un matériau, appelée aussi lambda et exprimée en W/m.K, décrit la capacité d’un matériau à transmettre la chaleur. Par exemple, le béton transmet moins la chaleur que le bois, et le bois moins que l’acier. La conductivité thermique est une caractéristique physique propre de chaque nature de matériau, indépendamment de son épaisseur. [voir Tableau 4 des valeurs et des unités en fin d’article]. Le calcul de la résistance thermique d’une couche d’un matériau d’épaisseur égale est ainsi simple : 

Rth= épaisseur du matériau/lambda du matériau
Rthest proportionnelle à l’épaisseur du matériau et inversement proportionnelle à sa conductivité thermique.

La résistance thermique totale d’une paroi est égale à la somme des résistances thermiques des couches de matériau composant la paroi, auquel on ajoute une résistance thermique superficielle intérieure et extérieure : Rsiet Rse. Les Rsi et Rse illustrent la résistance thermique entre les surfaces intérieures et extérieures des parois avec l’air situé respectivement à l’intérieur et à l’extérieur de la paroi, et sont de valeurs fixées par les règles TH-bât.

Par exemple, pour une paroi composée de trois couches de matériau, un mur en béton + ITE (isolation par l’extérieur) + enduit mince [Voir schéma A] : 

Rthtotale de la paroi = Rsi+ Rbéton+ Rite+ Renduit+ Rse
Soit Rsi+ épaisseur béton/lambda béton + épaisseur ITE/lambda isolant + épaisseur enduit/lamda enduit + Rse

Schéma A – Mur béton + ITE

Conductance thermique surfacique d’une paroi 

En termes d’économie d’énergie, l’un des objectifs pour le bâtiment est de diminuer la conductance thermique des parois dans le neuf comme dans l’ancien. La conductance thermique surfacique, notée U, s’exprime en W/m2.K. Elle qualifie, pour une surface de paroi de 1 m2et une différence de température de 1K (1K = 1 °C) entre l’intérieur et l’extérieur de cette paroi, la déperdition énergétique en1 Joule par seconde (1 J/s = 1 W).

La conductance de la paroi se déduit de la résistance thermique totale de la paroi : U = 1/Rthtotale de la paroi.

Exemples de calcul pour une toiture isolée et pour un mur isolé :Une dalle haute en béton armé de 18 cm + 15 cm d’isolant de lambda 0,03 W/m.K + étanchéité bitumineuse auto-protégée de 5,20 mm

Tableau 1.

Logement de fonction de l’ERDP Hériot, La Boissière l’Ecole (78). Isolation thermique de la toiture sous tuile et de la façade sous enduit, en verre cellulaire Foamglas. [©DR]
Logement de fonction de l’ERDP Hériot, La Boissière l’Ecole (78). Isolation thermique de la toiture sous tuile et de la façade sous enduit, en verre cellulaire Foamglas. [©DR]

Reprenons l’exemple de la toiture isolée décrite ci-dessus et regardons l’évolution de sa performance thermique lorsque l’on diminue ou augmente l’épaisseur de la couche isolante.

Tableau 2.

L’unité de la conductance, en W/m2.K, est cependant concrètement peu compréhensible en elle-même. Aussi, illustrons sa signification en l’utilisant dans un calcul simple de la déperdition thermique en euros (€) d’une paroi, pendant une durée donnée, une surface donnée et pour une contrainte de différence de température intérieur/extérieur donnée.

Incidence énergétique et financière liée à l’épaisseur de l’isolation thermique d’une paroi 

En effet, sans utiliser des logiciels sophistiqués intégrant de nombreux paramètres, il est possible, pour une paroi simple, d’approcher la déperdition d’énergie effective, en euros (€), en utilisant les résistances thermiques et conductances présentées ci-dessus. 

L’intérêt de cette démarche est de concrétiser, par un calcul rapide et avec un résultat en kW.h ou en euros, l’impact d’un changement d’épaisseur d’isolant sur la déperdition énergétique d’une paroi.

Pour cela, considérons une période donnée, d’octobre à mars, avec une contrainte de différence de température moyenne intérieur/extérieur de 14 °C (correspondant à un lieu comme la ville d’Orléans, pour un bâtiment de température intérieure 20 °C) pour une surface de toiture de 100 m2, et pour un coût d’énergie classique d’un chauffage au fioul de 0,07 €/kW.h.

Déperdition énergétique 1 (en kW.h) = U (joules par seconde par mpar degré °C) x 100 (m2) x 14 (degrés) x 180 (jours) x 24 (heures) x 60 (minutes) x 60 (secondes) / 3 600 000 (nombre de Joules dans 1 kW.h) 

Déperdition énergétique 2 (en €) = Déperdition 1 x 0,07 (coût d’énergie classique d’un chauffage au fioul)

 Fondation JDB pour la prévention du cancer, à Fontenay-lès-Briis (91). Isolation des toitures sous dalles sur plot et des façades sous parement ventilé, en verre cellulaire Foamglas. [©AP Architecture]
Fondation JDB pour la prévention du cancer, à Fontenay-lès-Briis (91). Isolation des toitures sous dalles sur plot et des façades sous parement ventilé, en verre cellulaire Foamglas. [©AP Architecture]

Le Tableau 3, ci-dessous, liste les résultats obtenus pour la toiture prise en exemple précédemment, en diminuant l’épaisseur de l’isolant de 5 et 10 cm, ou à l’inverse, en l’augmentant de 5 et 10 cm.

Tableau 3.

Au-delà de cette analyse rapide de performance, notons que l’évolution du volume des isolants mis en œuvre dans le bâtiment est telle qu’il devient un sujet d’intérêt public. Les études concernant les impacts des isolants thermiques suivant leur nature de matériau vont se multiplier : bilan carbone, durabilité de leur performance thermique (l’assurance décennale ne couvre pas la détérioration dela performance thermique), comportement  mécanique et hygrothermique suivant les techniques de mise en œuvre, étanchéité à l’air des matériaux, comportement réel en cas d’incendie, pollutions diverses, coût global… 

Tableau 4.

Gilles Mugnier,
Ingénieur,
Professeur à l’ESTP,
Responsable des ventes Ile-de-France chez Pittsburgh Corning France