La Réunion : Le béton, comme un poisson dans l’eau

Rédaction
15/11/2017
Modifié le 21/09/2021 à 17:22

Le plus grand viaduc de l’île de la Réunion, celui du Littoral, accueille sur six de ses piles des éco-récifs sous-marins... en CCV.

C’est le cabinet marseillais Architeuthis, spécialisé dans l’architecture écologique sous-marine, qui a retenu en 2013 pour son expérience et ses réponses aux problématiques écologiques, par le groupement constructeur de la NRL. [©Architeuthis]

Projet titanesque, la Nouvelle Route du Littoral sur l’île de La Réunion déploiera sur 12 km une alternance de digues et de viaducs implantés en plein océan Indien, entre 60 m et 300 m de la côte. Le plus grand d’entre eux, le Viaduc du Littoral, s’étendra sur 5,4 km. Pour assurer l’équilibre environnemental de sa construction, de nombreuses mesures compensatoires ont été prises en faveur des éco-systèmes locaux. Il a notamment été décidé que six des 48 piles de l’ouvrage seraient équipées de modules préfabriqués en CCV, destinés à accueillir la faune sous-marine. Car un nouvel état d’esprit préside lors de la conception des nouveaux ouvrages maritimes. Si quelques années auparavant, les ingénieurs ne se préoccupaient que de la résistance de leurs œuvres, dorénavant l’impact environnemental est envisagé dès les prémices de la conception. Ainsi, le Viaduc du Littoral accueille 120 éco-récifs sous-marins. Préfabriqués en Métropole par MPB, ils ont été acheminés à La Réunion pour être installés à terre, au cours de l’année 2016, sur l’aire de préfabrication des piles du Viaduc. Un an d’études préalables et de mises au point technique a été nécessaire pour répondre aux caractéristiques biologiques locales et celles physiques, hors norme de la vague centennale, qui peut atteindre les côtes réunionnaises lors des épisodes cycloniques

Une Marseillais à La Réunion
C’est le cabinet marseillais Architeuthis, spécialisé dans l’architecture écologique sous-marine, qui a retenu en 2013 pour son expérience et ses réponses aux problématiques écologiques, par le groupement constructeur. Il a conçu et fabriqué les éco-récifs. Ingénieurs et biologistes ont déterminé les deux types d’habitats artificiels, qui pouvaient satisfaire à la fois les cycles naturels et la résistance structurelle : les modules “Mangrove”, près de la surface de la mer (sub-surface) et les “Panal”, fixés sur les parois verticales de la pile du viaduc à proximité du fond. La bouée support des modules sub-surface, qui avait été fournie à Architeuthis, n’ayant pas supportée les rigueurs de l’océan Indien, ces modules n’ont pu être validés. Ceux retenus, les “Panal” sont en Composite ciment-verre (CCV), dont les fibres de verres se substituent aux armatures classiques du béton armé, ménageant des niches-nurseries pour les poissons. Ils constituent aussi un support au développement des coraux. « Au bout d’un an, nos éco-récifs accueillaient 400 % de poissons de plus que les modules témoins nus », souligne Etienne Clamagirand, fondateur d’Architeuthis. Tout comme le viaduc, les modules peuvent ainsi résister à « des pressions de plus de 10 t/m², correspondant à l’impact d’une vague centennale de 13 m de haut ». Prenant la forme de panneaux rectangulaires de 1,50 m de haut par 1 m de large, ces éco-récifs sont fixés verticalement au pied du fût de chaque pile, entre 4 m et 7 m de profondeur. « Ils présentent des structures en nids d’abeilles déformés », précise Etienne Clamagirand. Chaque module comporte une trentaine de polygones irréguliers en 3D. La production en a été un défi pour Architeuthis. Le challenge qu’engendrait la fabrication de pièces d’une demi-tonne de Composite ciment-verre constituées de 1 200 faces représentait une véritable problématique technique. Grâce à la collaboration entre Architeuthis et l’ensemble des fabricants, ainsi que du groupement, cela a été rendu possible.

M.C.