Œuvre de l'architecte Alphonse Bertrand, la villa Belza se dresse en face du trou de Diable, à Biarritz. Situation qui en a fait pendant des décennies l'antre du mystère.
Le rocher du Cachaous prend place entre la côte des Basques et le Port Vieux, à Biarritz, en face du trou de Diable. Une villa se dresse là, avec orgueil en défiant l’océan. Une belle centenaire qui a su surmonter les ravages du vent et du sel. L’histoire de la Villa Belza commence en 1825. Le cultivateur Dominique Daguerre devient propriétaire d’un champ implanté sur les rochers, appelé champ du rossignol ou Trespots (en gascon, tres “qui est au-delà” et pots “hauteur”). Un rocher sauvage dont personne ne veut et qui changera plusieurs fois de mains jusqu’en 1882. C’est alors qu’Ange Dufresnay, directeur général de la compagnie d’assurances Le Phénix à Paris s’en porte acquéreur et décide de construire une demeure pour sa femme Marie-Belza Dubreuil.
Lieu enchanté
Le projet est dessiné par l’architecte Alphonse Bertrand qui a déjà réalisé le casino Bellevue et le château Grammont de Biarritz. Les travaux, confiés à l’entrepreneur A. Joly, débutent en 1889 pour se terminer en 1895. Ils permettent de créer une surface suffisamment grande et plane pour monter l’édifice rectangulaire de 115 m2 au sol, avec deux étages et des aménagements sous les toits. Pour la construction, l’entreprise recourt eux technologies nouvelles : le béton armé et les pieux en acier. En revanche, la complexité du terrain rend impossible l’adduction de l’eau courante : la ville de Biarritz imposant au propriétaire de réaliser les travaux à ses risques et périls. Quant à l’éclairage au gaz, il n’est installé qu’après plusieurs tentatives infructueuses.
C’est le donjon néo-moyenâgeux et la tourelle en poivrière, construits par Dominique Morin, qui offrent au bâtiment son aspect spectaculaire. Et le propulsent dans le monde enchanté. En 1908, le site sert même de décor à quelques films1. Son implantation sur les hauts rochers, à proximité du trou de Diable, et son nom “Belza” qui signifie “noire” en basque font le reste. La villa se retrouve au cœur des légendes de sorcellerie et de revenants pendant des décennies.
Renaissance
En 1923, une nouvelle étape s’ouvre dans l’histoire de la bâtisse. Mme Dufresnay, veuve, la loue alors à Grégoire Beliankine, beau-frère d’Igor Stravinsky. Elle accueille dorénavant un restaurant russe et change de nom pour “Château basque”, la propriétaire ayant interdit celui de Belza. C’est maintenant un antre de divertissement et un lieu de dîners somptueux qui attirent l’élite parisienne, la jeunesse dorée, mais aussi les réfugiés de la révolution russe. En 1927, le bâtiment est entièrement rénové et l’une des salles est transformée en auberge campagnarde du XVIIe siècle. Et les fêtes continuent jusqu’à la guerre. En 1940, la villa est réquisitionnée, restaurée et divisée en sept appartements. Manque d’entretien et discordes entre les copropriétaires entraînent la dégradation du bâtiment. Un incendie provoque des dégâts importants. Rachetée et partiellement rénovée par un noble espagnol, elle subit un autre incendie en 1974. Les deuxième et troisième étages sont alors détruits. La villa reste à l’abandon pendant une trentaine d’année jusqu’à ce que Jean-Marc Galabert, un marchand de biens parisien, ne l’achète et ne la restaure. Les architectes Vincent Bastie et Aude Bruguière l’ont aidé à en faire des appartements, faute de pouvoir la transformer en hôtel. Ayant retrouvé sa splendeur d’antan, la ville de Biarritz l’a classée en 1997.
Mariola Gluzicki
Source : www.biarritz.ovh.org
1Plus récemment, la bâtisse a inspiré Bernadette Pécassou-Camebrac pour son roman “La Villa Belza”, éditions Flammarion, 2007.