Décédée en 2016, la architecte britannique d'origine irakienne Zaha Hadid fut la première des “starchitectes” féminines, faisant partie des élus au prestigieux prix Pritzker (2004), dont la création remonte à 1848... Retour sur son parcours révolutionnaire.
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Zaha Hadid est née en 1950 à Bagdad, en Irak. C’est après avoir étudié les mathématiques qu’elle s’oriente vers l’architecture, en 1972. Diplômée de l’Architectural Association de Londres en 1977, elle crée sa propre agence londonienne dès 1979.
Connue pour ses peintures et ses dessins aux lignes acérées, Zaha Hadid concevait ses bâtiments comme des paysages en mouvement, fragmentés et aux perspectives multiples. Une démarche portée par son associé Patrik Schumacher et amplifiée par une utilisation poussée des outils numériques de conception.
Une architecte révolutionnaire
Le nom de Zaha Hadid figure aujourd’hui parmi les artistes les plus renommés du déconstructivisme, tel Frank Gehry. Mais elle est surtout une figure majeure de ce que certains historiens de l’architecture appellent désormais le “paramétricisme”. « Ce style nouveau succède au post-modernisme et au déconstructivisme. Le modernisme se fondait sur le concept d’espace. Le paramétricisme différencie les champs. Ces derniers sont remplis, comme occupés par un médium fluide. De la composition des parties, nous nous orientons vers des champs de particules dynamiques. On pourrait penser à des liquides en mouvement, structurés par des vagues irradiantes, des flux laminaires et des tourbillons en spirale1».
La carrière de Zaha Hadid connaît des débuts lents et tortueux. Dans les années 1980, ses projets sont tout de suite classés comme difficiles, voire impossibles, à construire. « Je n’ai pas été acceptée en tant qu’architecte. Je suis toujours considérée comme à part, malgré tout ce que j’ai fait. Cela ne me dérange pas. C’est une bonne place. […] J’étais une femme et je faisais des choses étranges… J’ai tout de suite été stigmatisée. »
« Architecte : le mot est faible pour brosser le portrait de Zaha Hadid, également mathématicienne, designer d’intérieur. Et enfin, bien qu’elle en refuse le titre, artiste au tempérament fougueux. L’Irako-Britannique a même enseigné dans les universités les plus prestigieuses du monde, de Columbia à Yale, en passant par Cambridge », pouvait-on lire dans les hommages posthumes.
Fantasque, avant-gardiste, Zaha Hadid a laissé une empreinte indélébile sur le monde de l’architecture. On parle de “son futurisme audacieux”. En effet, l’architecte anglaise a brisé les codes et redéfini les règles. A l’heure de sa disparition brutale en 2016, elle appartenait à l’élite de l’architecture mondiale des années 2000. Dans ce sens, Zaha Hadid fut une architecte révolutionnaire.
La “Reine de la courbe”
Au cours des dernières années de sa vie, ses visions audacieuses sont devenues réalité malgré ses détracteurs. Marquant ainsi les villes et diverses structures d’un langage architectural unique et novateur. Et ce, en béton, toujours en béton. Comme en témoignent le Centre d’art contemporain Rosenthal à Cincinnati (Etats-Unis), le musée d’art contemporain Maxxi à Rome (Italie), l’opéra de Canton (Chine) et le Centre aquatique de Londres (Royaume-Uni) pour les Jeux olympiques de 2012.
Ses idées audacieuses ont été réalisées, insufflant un répertoire nouveau et unique en architecture. Dont la Maison du port à Anvers (Belgique), le stade Al Janoub au Sud de Doha (Quatar) et le spectaculaire terminal aéroportuaire de Beijing (Chine). Zaha Hadid refusait le linéaire de l’architecture contemporaine. Son style était basé sur les courbes. Elle vantait les formes flottantes, fluides, sinusoïdales et les conceptions architecturales high-tech. Son talent était à la croisée des mondes de l’architecture, artistique et du design.
Ses créations sont à la fois complexes et légères, illustrant un monde futuriste qui présente de nouveaux concepts spatiaux. Certains de ses projets sont présentés à titre posthume, notamment la statuette de Brit Awards 2017. Ainsi que plusieurs bâtiments, qui étaient en encore en construction au moment de sa mort, dont le stade Al Wakrah, au Quatar ou la gare maritime ultra moderne de Salerne, dans le Sud de l’Italie.
Muriel Carbonnet
1Texte publié dans le catalogue de la Biennale d’architecture de Venise en 2008.