Implantée à Bonneval, en Eure-et-Loir, l’entreprise de gros œuvre Dazard s’appuie surtout sur les moyens, la qualité et les prix pour faire évoluer la prévention.
Retrouvez cet article dans le n° 69 de Béton[s] le Magazine
Au début des années 1950, l’entreprise Dazard est créée par le grand-père de Clovis Dazard, l’actuel dirigeant. Spécialisée depuis l’origine dans les activités de gros œuvre, elle est présente sur les opérations de logements et d’ouvrages fonctionnels, en neuf comme en rénovation. Elle traite aussi quelques chantiers en entreprise générale et réalise, elle-même dans ce cas, le lot gros œuvre. Son effectif atteint 18 personnes.
Clovis Dazard gère directement tous ses chantiers. En effet, il n’est pas secondé par un conducteur de travaux. « Chaque matin, je suis présent à l’ouverture du dépôt et au départ du personnel vers les chantiers». Outre l’économie d’un poste de cadre, cette organisation permet à vrai dire de piloter et contrôler en temps réel l’avancement des travaux. De la même façon, ses équipes sont davantage responsabilisées et aptes à prendre des décisions. « Je leur donne les moyens de faire de la qualité et de travailler en sécurité », poursuit Clovis Dazard. Avec le matériel dont il dispose, ce dernier pourrait d’ailleurs faire travailler deux fois plus de salariés. D’autant que l’activité est repartie depuis quelques mois, mais à des prix encore souvent trop bas. Une voie dangereuse dans laquelle l’entreprise n’a pourtant jamais souhaité s’engager. Ce qui ne l’empêche pas de mener une politique de prévention.
Former dans la durée, fidéliser et assurer le confort des salariés
Le turn-over est limité, l’ancienneté importante. Néanmoins, Clovis Dazard a du mal à embaucher des personnes qualifiées. Pour contourner cette difficulté, le dirigeant a fait le choix de former des jeunes, avec la contrainte supplémentaire d’un niveau général en régression régulière. La moyenne d’âge au sein de l’entreprise s’établit à 41 ans : la moitié a moins de 30 ans, l’autre moitié plus de 50 ans. Les jeunes ont donc un rôle moteur.
De longue date, Clovis Dazard a intégré que les conditions de travail, les moyens et le confort de vie sont des vecteurs importants de prévention. « Les repas sont toujours pris au restaurant. Le confort des salariés est primordial, surtout en hiver. Nos métiers sont physiques et le fait de prendre un repas chaud aide à conserver une bonne forme. Nous intervenons en Eure-et-Loir et dans les départements périphériques, ce qui évite, entre autres, les grands déplacements, les coûts, la fatigue et les temps de trajet, qui s’y rapportent. »
Les formations et les informations liées à la prévention sont souvent programmées en décembre, un des mois le moins actif dans les métiers du gros œuvre. « Fin 2016, nous avons, par exemple, programmé une information sur l’amiante. Un sujet susceptible de concerner de manière directe le gros œuvre, en particulier en rénovation, lorsque l’on doit intervenir sur des matériaux contenant des fibres d’amiante. »
Toujours dans une démarche de prévention, l’entrepreneur réfléchit à des formations “gestes et postures”, afin de mieux sensibiliser le personnel de chantier à la nécessité de bien porter. Même si les moyens en matériels permettent de limiter les manutentions manuelles. Enfin, l’ensemble du personnel possède une formation de secouriste. Il est également titulaire des certificats d’aptitude à la conduite en sécurité(Caces), nécessaires au pilotage des différents engins de l’entreprise.
Autonomie, moyens et responsabilisation
Le parc de véhicules est composé de 12 utilitaires de toutes tailles : un camion 6 x 4 avec benne amovible, un camion 8 x 4 équipé en tribennes (déchargement par l’arrière et par les deux cotés), un tracteur avec plateau et une remorque porte-chars, des fourgons de 7 t de PTAC, aménagés pour tracter des remorques-bennes de 2,5 t de charge utile.
Dans son fourgon aménagé, chaque équipe dispose d’un outillage standard et spécifique : disqueuses, perforateurs à fil, perforateurs sans fil et scies circulaires. A quoi cela s’ajoutent des ligatureuses à armatures, contribuant beaucoup à la réduction de la pénibilité. Sans oublier un package personnalisé, contenant les EPI nécessaires à chaque fonction : casques, chaussures, gants et harnais pour les phases de montage d’échafaudages.
L’ensemble du personnel a une dotation de vêtements de travail haute visibilité au sigle de l’entreprise, avec un package de pantalons, de vestes, de sweat-shirts et de tee-shirts selon les besoins saisonniers. Ces vêtements sont lavés et entretenus en interne.
Toujours dans une démarche de diminution du stress et de la fatigue, tous les véhicules sont équipés de boîte de vitesse automatique, de GPS et de caméras de recul. Chaque samedi, ils sont lavés au dépôt.
L’investissement en matériel, vecteur de prévention et de productivité
Les équipes de chantier disposent de 6 chariots télescopiques Manitou et de 4 grues : une grue Potain 380 C permettant de soulever 1,5 t à 50 m, 2 grues Liebherr 32 TTcapable de lever de 1,1 t à 30 m, et enfin, une grue Potain Igo M14, tirée par le porteur 6 x 4, d’une capacité de 800 kg à 22 m.
Clovis Dazard reconnaît avoir investi dans des équipements parfois surdimensionnés pour les besoins du moment. Pour exemple, l’achat d’une grue “disproportionnée” de 230 000 € pour un programme de 10 logements, mais qui trouvera ensuite son utilité pour des opérations plus importantes. De plus, avec l’expérience, l’usage de gruedémontre des gains récurrents, en matière de sécurité et en productivité. Il faut y ajouter la propreté et le maintien en état du terrain, qui n’est plus défoncé par les engins de chantier.
D’une manière plus globale, privilégier l’investissement par rapport à la location s’explique d’abord par la disponibilité et par la volonté de responsabiliser le personnel. Ainsi, le matériel déjà amorti permet d’affronter avec plus de facilité les périodes difficiles, comme la crise qui a été très ressentie ces trois ou quatre dernières années.
Toujours dans une démarche d’autonomie, l’entreprise a investi dans une pompe à béton tractable P718 de Putzmeister. « J’ai fait mes premières armes chez un major du BTP, précise Clovis Dazard. J’ai ensuite adapté à une PME les modes de fonctionnement des grandes entreprises, en termes d’organisation et de sécurité. »
Limiter les pénibilités
L’entreprise Dazard possède un banc de préfabrication pour des applications particulières. Cette orientation vise à limiter, lorsque cela est possible, les travaux pénibles et en hauteur. Une démarche qui se retrouve dans l’utilisation de la technique du mur à coffrage intégré (prémur), si le contexte du projet s’y prête.
De plus, cette volonté d’investissement se retrouve au niveau des échafaudages. Le parc est composé d’une nacelle articuléeManitou 150 et de 1 200 m2 d’échafaudages Layher en acier, ce matériau étant mieux adapté que l’aluminium aux travaux de gros œuvre. Dans une démarche de prévention globale, Clovis Dazard explique qu’il est devenu courant de laisser l’échafaudage mis en place par le gros œuvre pour les lots suivants, y compris dans le cas de lots indépendants.
Pour la réalisation des façades en béton, l’entreprise fait appel à des banches-outils métalliques Sateco SC 9015 et à des banches Doka. En maçonnerie traditionnelle, elle utilise surtout des blocs béton montés au mortier. La technique du collage, très en vogue pour ces blocs comme pour les briques, n’a pas vraiment donné satisfaction, surtout pour des problèmes de fissures. De ce fait, l’entreprise reste fidèle aux mortiers, mais cherche là encore à réduire la pénibilité de la fabrication, grâce à l’investissement à court terme de silos et de centrales à mortier.
Des semaines de 41 h
A l’heure des débats sur l’évolution du temps de travail, l’entreprise Dazard maintient, de longue date, un horaire hebdomadaire de travail de 41 h. Et ce, en toutes saisons. Les raisons sont multiples. D’abord pour une raison mathématique. En effet, le temps de transport moyen de 1 h pour se rendre sur les chantiers (30 mn aller, 30 mn retour) s’amortit mieux sur une journée de travail de 8 h 30, en comparaison à celle de 7 h 30. Ensuite, Clovis Dazard estime que le maintien de ce temps de travail tout au long de l’année permet de conserver bien mieux un rythme régulier d’une saison à l’autre.
Gérard Guérit