Un ovale de 200 m de long pour 80 m de large. Ainsi se présente la Basilique Saint-Pie X de Lourdes. Un vaste lieu d’accueil pour les pèlerins, mais invisible sur le site, car enterré.
L’année 1958 a marqué le centenaire de l’apparition de la Vierge Marie à Lourdes. Quelque cinq millions de pèlerins sont venus célébrer l’événement… Afin d’accueillir toutes ces personnes dans les meilleures conditions, Mgr Théas, évêque de Tarbes et Lourdes, a voulu, dès 1951, l’aménagement du Sanctuaire. Avec, en particulier, la création d’un vaste lieu en mesure de contenir vingt milles fidèles, « à l’abri des intempéries ». Deux années plus tard, la direction des aménagements est confiée à l’architecte parisien Pierre Vago. Devant les exigences imposées – ne pas d’intervenir sur les lieux entourant la Grotte, ne pas dénaturer le site et être proche du Sanctuaire -, l’idée d’une structure enterrée est très vite apparue. Un “Grand Abri”, vaste ovale de 200 m de long pour 80 m de large. Après consultation, le projet de d’Eugène Freyssinet et des architectes Le Donné et Pinsard est retenu.
En 1956, les autorités ecclésiastiques confient l’exécution des travaux au groupement formé par Campenon Bernard, Béguère (de Lourdes) et Solétanche avec, comme terme des opérations, le 25 mars 1958, fête de l’Association.
Copie d’arcs du pont d’Esbly
La structure prend place dans une excavation à ciel ouvert, dans un sol alluvionnaire dont la forte perméabilité à l’eau a nécessité la réalisation d’un barrage périphérique étanche. A l’issue de ces travaux préparatoires, le débit d’infiltration est d’environ 100 m3/h, ce qui fit dire à Eugène Freyssinet : « La difficulté de ce bâtiment ne réside ni dans la nouveauté de ses formes, ni dans la hardiesse […]. Le seul problème, c’était l’eau ».
Pour lutter contre les venues d’eau, la totalité de la plate-forme est drainée en permanence, avec des pompes de relevage. Le radier n’ayant à supporter aucune sous-pression, il se compose d’une simple dalle en béton de 10 cm d’épaisseur, avec des joints de retrait selon une maille de 3,50 m x 3,50 m.
L’ossature porteuse du bâtiment consiste donc en une série de 29 portiques à béquilles fondés sur semelles superficielles. « Les formes portantes sont la copie des arcs du pont d’Esbly », résume Eugène Freyssinet. La liaison béquille-semelle est une “articulation” ou “coupure mince Freyssinet.” La pression de contact de la semelle est d’environ 3,5 kg/cm2, compatible avec les caractéristiques mécaniques du sol. La composante horizontale de la résultante des efforts transmis par la béquille est équilibrée par un buton qui prend appui sur le mur d’enceinte.
Adaptable à toutes les liturgies
En arrière de la béquille prend place un tirant intégrant trois câbles de précontrainte. La précontrainte est aussi présente dans les portiques : 12 câbles Ø 7 mm donnant un effort permanant de 40 t. Une entretoise longitudinale de 200 m de long fait office de clef de voûte des portiques qui supportent une dalle de couverture, elle-même recouverte de terre végétale.
Eclairage, sonorisation et ventilation constituent l’essentiel des aménagements intérieurs. Le volume d’air contenu à l’intérieur de la basique est de l’ordre de 100 000 m3, soit 5 m3/h par pèlerin. Son renouvellement est assuré à travers des orifices créés dans la dalle de couverture, de part et d’autre de l’entretoise centrale. Deux ventilateurs de 60 000 m3/h de débit assurent l’alimentation en air.
La dernière singularité de l’édifice est l’absence de chœur avec un autel en position centrale, sachant que la Basilique a été édifiée avant le Concile de Vatican II. Ce qui fait dire à Mgr Jacques Perrier, l’actuel évêque de Tarbes et de Lourdes : « Cette disposition permet de s’adapter à toutes les liturgies, il suffit seulement de se tourner du bon côté ».
Frédéric Gluzicki