L’intégration de matériaux recyclés dans la construction

Rédaction
02/12/2021
Modifié le 13/02/2023 à 12:44

A compter du 1er janvier 2023 au plus tard, la loi Agec soumettra les produits et matériaux de construction au principe de responsabilité élargie du producteur (Rep). Explications avec le cabinet 1792 Avocats.

Article paru dans le n° 97 de Béton[s] le Magazine.

Le recyclage est l’opération par laquelle la matière première d’un déchet est utilisée pour fabriquer un nouvel objet.[©ACPresse]
Le recyclage est l’opération par laquelle la matière première d’un déchet est utilisée pour fabriquer un nouvel objet.[©ACPresse]

Le secteur du BTP génère 230 Mt/an de déchets. Dans le bâtiment, plus de 90 % de ces déchets proviennent de la déconstruction et de la réhabilitation. Les enjeux de leur réutilisation sont l’économie de ressources limitées, le gain en compétitivité et la préservation de l’environnement. A ce titre, le tri des déchets à la source, avec valorisation et traçabilité, semble la solution la plus crédible. Un objectif de réutilisation ou recyclage de 70 % a d’ailleurs été fixé par le gouvernement. 

I – Traitement des déchets

La loi anti-gaspillage et relative à l’économie circulaire (Agec) du 10 février 2020 a précisé le “principe de responsabilité élargie du producteur (Rep1)”. Selon lequel tout producteur de déchets devient contraint, non plus simplement à gérer les déchets produits.

Mais aussi à participer à l’éco-conception des produits, à favoriser l’allongement de leur durée de vie, et à contribuer au traitement et au recyclage de ses déchets.

Ceci, notamment par la mise en place collective, par les producteurs, “d’éco-organismes agréés. Auxquels ils transfèrent leur obligation et versent en contrepartie une contribution financière”. Il est ainsi fait obligation au fabricant d’un produit qui génère des déchets de financer sa fin de vie.

La loi Agec soumettra les produits et matériaux de construction à ce principe de Rep au plus tard le 1er janvier 2023.

Un décret en Conseil d’Etat va venir en définir les modalités d’application, ainsi que les conditions minimales du maillage des points de reprise.

II – Réutilisation des déchets

Le réemploi est l’utilisation à nouveau d’un bien pour un usage identique à son usage initial (châssis, coffrages, vitrages par exemple). La réutilisation permet à un déchet d’être utilisé à nouveau pour un usage différent (réutilisation de poutres en bois pour du mobilier ou des cloisons). Le recyclage, lui, est l’opération par laquelle la matière première d’un déchet est utilisée. Ceci, pour fabriquer un nouvel objet (granulats recyclés réintroduits dans du béton, laitiers sidérurgiques incorporés dans du ciment…).

Si un tri des produits de construction est effectué par un opérateur habilité, ceux destinés au réemploi ne prennent pas le statut de déchet2. Ils échappent ainsi naturellement à toute obligation au titre de la Rep ou d’une simple valorisation et traçabilité des déchets. 

La mise en œuvre des obligations d’utilisation de matériaux réutilisés ourecyclés relève, pour l’instant, de la compétence des conseils régionaux. Afin de tenir compte des spécificités de chaque territoire. Néanmoins, la pratique inclut de façon presque systématique la stipulation de ces obligations d’utilisation de matériaux réutilisés ou recyclés dans les appels d’offres de lots dédiés. Tout comme leur intégration dès le projet architectural, le sourcing de fournisseurs locaux. La conclusion de contrats de cession entre maîtres d’ouvrage producteurs et maîtres d’ouvrage utilisateurs, et la désignation d’un bureau de contrôle. 

Par ailleurs, les pouvoirs publics font preuve d’une volonté générale d’aide au développement de ces pratiques. Telle par exemple une tolérance de 10 % de hauteur supplémentaire des bâtiments par rapport au plan local d’urbanisme (PLU) en cas d’utilisation de matériaux recyclés.

Attention cependant, réemploi et réutilisation supposent une expertise technique (du matériau comme du procédé constructif associé). Afin d’apporter une nouvelle garantie sans surprime d’assurance, d’une part. Et afin de respecter les normes techniques applicables3, d’autre part.

Pierre Lacoin
Avocat à la Cour
Cabinet 1792 Avocats

[1]Code de l’environnement, art. L.541-10.
2id., art. L.541-4-4. 
3Notamment NF EN 206/CN et NF EN 15804/CN.

Article paru dans le n° 97 de Béton[s] le Magazine.